Digital Business Africa – Par Raul Vahisalu, Vice-président de la Technologie chez Global Voice Group.
La crise sanitaire sans précédent dont la majorité des pays fait actuellement l’expérience requiert une augmentation du nombre d’outils nécessaires à l’endiguement de la pandémie du COVID-19, ainsi que l’utilisation plus poussée des technologies de données, en plus des mesures conventionnelles. Cette approche est valide pour toutes les épidémies et se révélera bénéfique en cas de crise sanitaire future.
Dans la course contre la montre dans laquelle les autorités se sont engagées dans le but de limiter les effets de la pandémie de Coronavirus et le bilan des décès associés, l’analyse des métadonnées créées quand nous utilisons nos téléphones portables pourrait se révéler être un important allié, pour plusieurs raisons. Premièrement, elle permet de mieux faire respecter les instructions relatives au confinement, en observant les mouvements de la population, et deuxièmement, elle vérifie les contacts des personnes infectées.
En Lombardie, la région d’Italie la plus affectée – l’Italie étant le pays d’Europe le plus affecté par l’épidémie de COVID-19 –, les opérateurs de télécoms ont mis à la disposition des autorités les données relatives à la localisation des appels mobiles, ce qui a permis de déterminer que seulement 60% de la population restait à la maison. Loin de permettre le suivi des terminaux mobiles, qui serait incompatible avec la réglementation européenne relative à la protection des données mise en œuvre à la mi-2018, ce procédé technologique donne aux autorités la possibilité de superviser la réduction des déplacements sur une certaine période. Cette approche pourrait être imitée, comme le montre le projet en cours entre une start-up et l’École de Médecine de Hanovre, qui vise à déployer une plateforme d’analyse de données capable de suivre les personnes dont le test s’est révélé positif et leurs contacts, par exemple. Bien sûr, un tel suivi requiert le consentement des personnes concernées.
Au-delà du soupçon spontané qu’elle pourrait engendrer, cette approche aiderait à faire respecter le confinement, à suivre les mouvements des individus s ayant été exposés au virus et ainsi à identifier les personnes risquant d’être infectées. L’utilisation des données de géolocalisation des smartphones contribueraient donc ainsi à ralentir la propagation du virus.
En Afrique, plus de 40 des 55 pays ont déjà confirmé des cas. Bien que l’Afrique du Nord et l’Afrique du Sud soient les régions les plus affectées du continent, les faits montrent que presque aucun pays n’a été épargné. L’Afrique du Sud, le Nigéria, le Sénégal, le Mali, Madagascar, le Maroc, l’Algérie, le Kenya et le Ghana ont déjà totalement ou partiellement fermé leurs frontières.
Ces sombres perspectives sont aggravées par l’insuffisance de certains systèmes de santé, qui ne sont pas prêts à faire face à un afflux massif et soudain de patients, dont certains nécessitent des soins intensifs. Le 18 mars, le directeur de l’OMS, Tedros Adhanom Ghebreyesus, a exhorté l’Afrique à se réveiller, soulignant que, pour contrôler et mettre à fin à cette épidémie, les pays devaient tester, isoler et superviser les contacts, sans quoi la chaîne de transmission continuerait et ferait à nouveau surface une fois que les mesures de distance physique auront été levées. Dans ce cadre, la souplesse de la réglementation des télécoms représente un atout qui doit être mis à profit.
GVG possède une longue expérience en matière de collecte et d’analyse des données en soutien au processus décisionnel des gouvernements et des régulateurs. Selon nous, les métadonnées téléphoniques peuvent aider les gouvernements à mieux comprendre la propagation des maladies infectieuses et à mitiger son impact en temps de crise. En effet, les données rassemblées par le réseau mobile peuvent servir à mieux informer les processus décisionnels en temps réel, en vue de permettre un traitement plus poussé des données et de faire des prévisions relatives à la modélisation scientifique.
Cela a déjà été vivement recommandé dans le cadre de la lutte contre la malaria et la tuberculose. Au Bangladesh, une étude novatrice réalisée en juin 2019 a démontré qu’en permettant de suivre les mouvements des individus, les données issues des réseaux de téléphonie mobile pouvaient aider à prédire où des épidémies comme celles de malaria sont susceptibles de se déclarer, ce qui donnerait aux autorités sanitaires la possibilité de prendre des mesures préventives.
Mégadonnées pour le bien social
De même, dans le cadre de l’engagement de l’industrie mobile aux ODD, la GSMA a lancé « Mégadonnées pour le bien social » (« Big data for social good ») en 2017, une initiative permettant aux opérateurs de télécoms d’établir une approche commune dans le but d’analyser des données anonymisées rassemblées à partir des réseaux, pour aider les agences publiques et les ONG à faire face à la crise la plus sévère de notre temps. Au cours de l’assemblée générale des Nations Unies qui a eu lieu en septembre 2018 pour identifier les moyens d’accélérer les efforts d’éradication de la tuberculose, les chefs d’État présents ont évoqué la possibilité d’utiliser les mégadonnées issues des réseaux mobiles pour identifier les populations vulnérables.
Les métadonnées téléphoniques en temps réel peuvent servir à observer les mouvements des individus et à suivre la chronologie des contacts entre les personnes affectées, afin d’analyser la façon dont le virus se propage et ainsi de décider si une quarantaine est nécessaire dans certains endroits. L’efficacité de ces métadonnées peut également être évaluée et d’autres mesures mises en place, si nécessaire. Au bout du compte, s’il est démontré qu’une personne porteuse du virus a contaminé d’autres personnes, cette approche permettrait d’identifier et de localiser la majorité des personnes concernées, à des fins de prévention.
Le post-traitement des données permet de modéliser et de prédire l’impact économique dans une zone précise, d’identifier les implications géographiques et de prédire les mouvements de la population d’un pays donné. Les résultats de l’analyse peuvent être présentés par le biais d’un tableau de bord, sous la forme d’indicateurs de vérification rapide faciles à comprendre, de cartes géographiques et de graphiques. Cela aidera les gouvernements à se préparer pour l’avenir et à mieux faire face aux nouvelles épidémies qui se déclareront inévitablement.
Par Raul Vahisalu, Vice-président de la Technologie chez Global Voice Group
M. Raul Vahisalu détient un MBA (Entrepreneuriat et gestion de la technologie) et une maîtrise en sciences sociales (Gestion de l’information) des université estoniennes de Tartu et de Tallin respectivement. Il a occupé des positions de cadre exécutif dans de nombreuses organisations au cours des 15 dernières années. M. Vahisalu apporte à GVG une vaste et éminente expérience en matière de gestion de la R&D, ainsi que de conception et de mise en œuvre de projets high-tech, entre autres domaines d’expertise propres à l’industrie. de l’information.