L’usage de l’argent mobile s’est développé de manière exponentielle sur le continent au cours de l’année passée, en raison d’une numérisation accrue et de la sophistication de l’écosystème des transactions numériques.
Le Kenya, l’un des chefs de file mondiaux en ce qui concerne l’adoption de l’argent mobile, a battu un record entre janvier et novembre 2021, les utilisateurs ayant effectué des transactions d’une valeur de 55,1 milliards USD (6,2 billions KES), selon des données de la Banque centrale du Kenya.
Ce chiffre dépasse les 45,9 milliards USD (5,2 billions KES) enregistrés fin 2020, et représente également la valeur la plus élevée depuis l’introduction des portefeuilles mobiles dans le pays.
Il est également important de noter que cette augmentation s’est produite malgré le retrait des subventions que le gouvernement a mis en œuvre en 2020, en raison de la pandémie de la Covid-19, afin d’alléger la charge sur les personnes effectuant des transactions et d’encourager l’utilisation des paiements sans numéraire.
Cette croissance se produit partout sur le continent.
Des données de la Banque mondiale ont montré que le Ghana était le marché de l’argent mobile qui s’est développé le plus rapidement en Afrique au cours des cinq dernières années.
Selon une étude intitulée « Five Strategies for Mobile-Payment Banking in Africa », les transactions effectuées par le biais de téléphones et de portefeuilles mobiles représentaient
82 % du produit intérieur brut (PIB) du Ghana, comparé à 87 % au Kenya, malgré des taux de pénétration des smartphones plus bas que celui de la Chine, le seul pays dont la pénétration générale des services financiers mobiles est plus élevée que celle de l’Afrique.
Le succès généralisé de l’argent mobile en Afrique doit beaucoup au fait qu’il permet à des individus qui éprouvent des difficultés à ouvrir un compte bancaire traditionnel à s’intégrer à l’écosystème financier formel.
D’autres nations en dehors de l’Afrique ont cherché à développer leurs propres plateformes de paiements mobiles, comme l’appli Venmo. Cependant, beaucoup de ces dernières sont reliées à des comptes bancaires, ce qui ne les rend accessibles qu’aux utilisateurs de l’écosystème financier formel.
Selon des données du Wall Street Journal, presque la moitié des 1,04 milliard de comptes en argent mobile existant dans le monde sont enregistrés en Afrique subsaharienne.
Cependant, il est possible d’optimiser le succès de l’argent mobile en Afrique subsaharienne en améliorant l’interopérabilité et en adoptant les technologies nécessaires à la supervision du secteur.
Le Ghana a mis en œuvre son premier système d’interopérabilité de l’argent mobile en 2018. Cette initiative a été lancée en raison de la nécessité d’éliminer les barrières et les complexités associées aux transferts effectués sur les différents réseaux d’argent mobile.
De 2018 à 2021, le nombre d’individus âgés de 15 ans et plus possédant un compte en argent mobile a augmenté de 13 % à 38,9 %, selon des données provenant de Statista.
Le Kenya a également adopté l’interopérabilité de l’argent mobile en 2018, car cette année-là, le nombre d’abonnés à l’argent mobile était de 37,8 millions, d’après des données de CBK. Aujourd’hui, ce chiffre a augmenté pour atteindre 67,15 millions au mois de novembre 2021.
James Claude, le PDG de la société de technologie réglementaire et d’analyse des Big Data Global Voice Group (GVG), estime que l’interopérabilité de l’argent mobile peut profiter grandement à l’Afrique et lui permettre de reproduire l’expansion connue en 2021.
Selon lui, l’écosystème de l’argent mobile a connu une révolution indéniable au cours des dernières années. Il y a de cela seulement un an, 562 millions d’Africains utilisaient les services d’argent mobile, ce qui représente une augmentation de 12 % par rapport à l’année précédente.
Il ajoute que cette révolution a favorisé l’inclusion financière sur le continent, mais il reste encore beaucoup de chemin à faire pour réduire la population non bancarisée dans la région. À cet égard, l’interopérabilité de l’argent mobile contribue grandement à faire baisser les coûts liés à l’envoi et à la réception d’argent sur le continent africain, ce qui améliore l’accès à ces transactions numériques.
Durant ses années formatrices au Kenya, l’argent mobile servait principalement à effectuer des transactions de pair à pair (P2P), mais est depuis également devenu un mode de paiement majeur pour les entreprises.
Aujourd’hui, de nombreuses entreprises peuvent recevoir des paiements effectués par leurs clients en argent mobile, et d’autres utilisent cette même méthode pour faire des versements. L’ampleur grandissante de l’industrie nécessite une supervision plus agile et plus efficace du secteur.
Ce mandat implique de multiples secteurs, les opérateurs de réseau mobile (ORM) et les services financiers s’inscrivant dans des catégories distinctes. La supervision des services d’argent mobile doit donc prendre cela en compte et faciliter la collecte d’informations pertinentes, ainsi que l’interprétation et l’analyse de ces dernières par les parties concernées.
Une analyse effectuée par des experts de PricewaterhouseCoopers (PwC) Kenya recommande l’adoption de technologies de supervision.
Selon les experts, l’analyse prédictive aidera à combler les lacunes, dans la mesure où elle permet la collecte, l’analyse et le reporting de données subjectives en temps réel.
L’impact global de la technologie sur l’amélioration de la supervision sera immense, surtout si l’on considère la vitesse à laquelle la numérisation des paiements s’est développée au cours des deux dernières années.
Dans l’ensemble, la croissance de l’argent mobile se poursuit, en raison de la pertinence de ces services à la situation du continent. L’accroissement de l’adoption des smartphones et la pénétration de l’internet jouera également un rôle clé.
James Claude soutient ce point de vue, soulignant le fait que le taux de cette croissance déprendra largement de la vitesse à laquelle les personnes non bancarisées pourront accéder à l’Internet et les problèmes d’interopérabilité seront résolus, en plus des problèmes de sécurité associés aux transactions en argent mobile.
Il ajoute qu’avec la mise en œuvre de technologies qui s’adaptent aux besoins de l’écosystème des paiements, ainsi qu’à ceux des destinataires, l’économie numérique, et plus précisément l’argent mobile, continuera certainement de se développer à un rythme rapide.*
Lire l’article original sur The Standard.
*Traduit à partir du texte anglais original.