«l’Afrique doit parler d’une même voix en matière de cyber sécurité»
Par Adama WADE, Financial Afrik
Global Voice Group (GVG) fournit divers produits et services aux gouvernements et aux autorités de régulation : des solutions informatiques de gouvernance, de suivi des flux de transactions financières et des dispositifs de lutte contre la cybercriminalité. Président directeur général du groupe, James Claude répond à nos questions.
Quel est le rôle de Global Voice Group dans un environnement numérique en pleine croissance en Afrique ?
Le développement du numérique en Afrique est effectivement en plein boom, mais on ne parle pas beaucoup de la régulation des télécoms, des services financiers numériques et de la cyber sécurité. Chez Global Voice Group, nous fournissons aux autorités de régulation des outils qui leur permettent de s’assurer de la bonne gouvernance du numérique en temps réel. Cela fait vingt ans que nous travaillons avec des régulateurs télécoms en Afrique. Notre expérience nous permet d’épauler les autorités et nos divers partenaires dans des secteurs économiques clés tels que la réglementation des télécommunications, la sécurité numérique, l’argent mobile et la surveillance des transactions financières, les solutions fiscales électroniques et la mobilisation des recettes. Nous avons aussi développé des outils spécifiques face à la menace croissante que représente la cybercriminalité.
Justement, où se situe l’Afrique en matière de cyber sécurité ?
Le continent africain est particulièrement vulnérable face à la cybercriminalité en général. En 2018, l’Afrique du Sud a perdu 150 millions de dollars, le Nigeria, 649 millions de dollars et le Kenya, près de 210 millions de dollars à cause des cyber attaques. Face à cette réalité, il faut multiplier les synergies pour faire face à ces menaces qui pourraient, si on n’y prend pas garde, freiner le développement de l’économie numérique. L’Afrique a tous les atouts pour jouer un rôle de premier plan dans la quatrième révolution industrielle mais la cyber criminalité peut la couper dans son élan.
Quels sont les pays qu’on pourrait qualifier de « bons élèves » en matière de lutte contre la cybercriminalité ?
Il y a de bonnes initiatives prises un peu partout sur le continent, comme au Rwanda, en Afrique du Sud et au Ghana, qui ont chacun mis en place un centre de cyber sécurité. Ailleurs, si les visions sont généralement bonnes, il faut maintenant les concrétiser. L’économie numérique étant un enjeu national et continental, les dirigeants des pays africains doivent prendre ce problème à bras le corps. En tant que partenaire des États africains, GVG s’est positionné sur la thématique de la cyber sécurité en développant SafetyNet, une plateforme de sécurisation de l’écosystème numérique. Ce nouvel outil de lutte contre la cybercriminalité est déployé pour éliminer toutes les menaces susceptibles d’affecter les différents canaux numériques et de mettre en danger la sécurité des internautes et des abonnés.
Quelles sont les menaces les plus fréquentes ?
En observant la configuration du marché africain, on se rend compte que le taux de connectivité à Internet est important. Les connexions se font plutôt via la téléphonie mobile, or la plupart des téléphones Android ont des systèmes qui ne sont pas régulièrement actualisés par les utilisateurs. Cela représente des failles de sécurité et autant de points d’entrée pour les menaces numériques. Dans ce contexte, Global Voice Group réfléchit à la façon dont États et opérateurs télécoms peuvent coordonner leurs approches.
Les opérateurs télécoms ont-ils des dispositifs éprouvés contre la cybercriminalité ?
Les opérateurs sont conscients qu’ils ont un rôle à jouer et ils sont nombreux à avoir développé des centres de cyber sécurité. De leur côté, les gouvernements, à travers les régulateurs des télécoms, ont mis en place des mesures intéressantes. Reste à évoluer vers un cadre associant identité numérique, souveraineté et protection des données. Pour cela, les pays doivent travailler ensemble. Le Rwanda exige par exemple que pour certaines applications, les données soient hébergées localement. L’identité numérique peut aussi contribuer à sécuriser les transactions. En définitive, il y a plusieurs dimensions à associer, comme la formation, le cadre règlementaire et la coordination.
Vous avez évoqué la notion de souveraineté numérique, or la plupart des data centers des États et des compagnies africaines sont situés à l’extérieur du continent…
La solution est connue. Un pays comme le Sénégal, avec quelques millions d’abonnés, ne représente pas une masse critique pour négocier avec Amazon ou implanter une solution coûteuse. Mais si tous les pays d’Afrique décidaient de le faire, alors ils seraient mieux pris en considération. Ils doivent parler d’une seule voix et avoir la même démarche en matière de souveraineté numérique.
Au final, quel rôle Global Voice Group entend-il jouer dans le secteur du numérique en Afrique ?
Nous nous considérons comme intégrateur de solutions en fournissant des solutions aux régulateurs télécoms, aux autorités fiscales et à toutes les agences gouvernementales dans le cadre du développement du numérique et de la supervision des flux de transactions financières. Nous pensons que l’identité numérique est quelque chose d’essentiel et de stratégique. L’Afrique peut y arriver, à condition de mutualiser ses solutions pour pouvoir peser davantage dans les négociations avec les géants mondiaux du numérique.